22 – A pied de Rīga à Berlin

Ce périple à pied entre Rīga (extrémité de la digue rive gauche de l’embouchure de la Daugava dans la mer Baltique) et Berlin (porte de Brandenburg) a été réalisé en 40 jours du 22 juillet au 30 août 2019.
Ce chemin est très bien balisé dans sa partie Compostelle, il traverse des quantités de forêts parfois primaires, le terrain est toujours en sable dur, les lacs d’origine glaciaire sont innombrables, souvent nichés dans les forêts avec une eau très pure. J’ai longé environ 150 lacs, occasion de près d’une centaine de bains ! Les monuments et croix des carrefours de chemins sont toujours décorés avec un grand soin par la population. La plupart des églises sont en parfait état, même dans les villages, et leurs intérieurs rivalisent de beauté.

Chemin d’Histoire
Cette traversée est-ouest de la Pologne s’est révélée être un « pèlerinage » où l’on se trouve fréquemment confronté à des lieux et personnages de l’histoire :
– Karol Józef Wojtyła / Saint Jean-Paul II (pape de 1978 à 2005) : pour les Polonais, catholiques très fervents, c’est toujours Karol le pape, 14 ans après sa mort. On ne compte plus les lieux qu’il a visité où il continue d’être célébré, notamment sur mon chemin : Wigry 1 – Wigry 2 – Gniezno – Lednica. Ma longue marche m’a fait réaliser le rôle important de Jean-Paul II comme homme de l’ombre de la chute du mur de Berlin et de l’indépendance des pays de l’Est. > archive INA
– Napoléon Bonaparte : la Pologne est le seul pays au monde, à part la France, où l’on aime Napoléon, pour la protection qu’il a apporté aux Polonais. Napoléon a séjourné 40 jours (février-mars 1807) au château d’Ostróda d’où il dirigeait l’Empire. Les paroles du bel hymne polonais cite d’ailleurs Bonaparte. Mazurka de Dombrowski
– Mikołaj Kopernik (Nicolas Copernic) : il a révolutionné l’astronomie et est né à Toruń (1473-1543). > wikipédia
– Adolf Hitler : il a dirigé les exactions de l’armée allemande, pendant 800 jours cumulés (entre 1941 et 1944), depuis le quartier général dénommé Wolfsschanze (tanière du loup), en pleine forêt sur la commune de Gierłoż où passe aujourd’hui le camino Polaco, une dizaine de km avant Kętrzyn. La visite de ce lieu est poignante.

Journal de ce périple en cliquant sur les liens de chacune des dates
Anglet (France) <17/7/19> Berlin (Allemagne) <18/7> Berlin <19/7> Berlin <20/7> Berlin <21/7> Rīga (Lettonie) <22/7> Rīga <23/7> Bauska <24/7> Pasvalys (Lituanie) <25/7> Panevezys <26/7> Kedainia <27/7> Kaunas <28/7> Birštonas <29/7> Alytus <30/7> Meteliai <31/7> Sejny (Pologne) <1/8> Wigry <2/8> Bakaniuk <3/8> Olecko <4/8> Borki <5/8> Giżycko <6/8> Kętrzyn <7/8> Reszel <8/8> Barczewo <9/8> Olsztyn <10/8> Ostróda <11/8> Iława <12/8> Nowe-Miasto-Lubawskie <13/8> Brodnica <14/8> Golub-Dobrzyń <15/8> Toruń <16/8> Inowrocław <17/8> Kwieciszewo <18/8> Gniezno <19/8> Lednica <20/8> Murowana-Goślina <21/8> Szamotuły <22/8> Sierakow <23/8> Rokitno <24/8> Międzyrzecz <25/8> Lubniewice <26/8> Ośno-Lubuskie <27/8> Słubice <28/8> Fürstenwalde (Allemagne) <29/8> Berlin-Schmöckwitz <30/8> Berlin (porte de Brandenburg) <31/8 et 1/9/19> Anglet.

Quelques courtes vidéos au cours de ce périple
Daugavgrīva le départ • fleuve Lielupe • confluence à Kaunas • église de Meteliai • camino Polaco en forêt • Toruń et la Wisla • best jezorio (lac) • Oder / Odra frontière

Sources de ce projet
Alors que nationalisme et euroscepticisme semblent gagner du terrain, relier à pied, en 2019, l’ex-bloc soviétique jusqu’à Berlin est l’occasion de mettre en valeur l’évidence de notre Europe intégrée, libre de circulation et en paix.
Commémorations :  En cette année 2019, il y a une étonnante convergence de commémorations de l’histoire  :
– 170 ans de la mort de Frédéric Chopin (Fryderyk Franciszek Chopin) à Paris, un des symboles  de l’amitié franco-polonaise. C’était le 17 octobre 1849. Marcheur mais aussi pianiste romantique, je vous propose d’écouter l’ultime composition de Frédéric Chopin pendant l’été 1849 (mazurka opus 68 n°4 en fa mineur) jouée par Arthur Rubinstein (autre polonais célèbre).
– 80 ans du début de la seconde guerre mondiale. L’armée allemande a envahi la Pologne le 1er septembre 1939. Le 17 septembre 1939, c’est l’armée soviétique qui à son tour attaque la Pologne par l’est.
– 70 ans de la proclamation de la RDA (République Démocratique Allemande). C’était le 7 octobre 1949.
– 30 ans de l’indépendance retrouvée de la Pologne, c’était le 13 septembre 1989. Cette indépendance a ouvert la série de l’indépendance des autres pays de l’ex-bloc soviétique.
– 30 ans de la chute du mur de Berlin, c’était le 9 novembre 1989. Ce « mur de la honte » avait été construit à partir du 13 août 1961.
– 15 ans de l’élargissement de l’Union européenne de 15 à 25 Etats membres. C’était le 1er mai 2004 pour les 10 Pays suivants : Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, PologneTchéquie, Slovaquie, Slovénie.
Pologne :  j’ai déjà marché en Pologne, mais seulement une dizaine de km. C’était il y a 3 ans, le 1/8/2016 au départ de mon chemin du Sněžník au Puy-en-Velay. Depuis ce moment, je pensais que je reviendrai un jour marcher en Pologne.
Baltique : en 2018, pour préparer mon chemin entre le cap Skagen et Strasbourg, j’ai étudié en détail la mer Baltique et son bassin versant dans lequel la Pologne, la Lettonie et la Lituanie occupent une large place.
Carte :  je dois avouer que j’ai pris goût au plaisir d’étendre vers le nord la carte de mes marches. Il s’agit de mon 22ème périple depuis le n°1, la Vía de la Plata en mai 2011.
Rīga : il a fallu trouver un point de départ emblématique pas trop compliqué à rejoindre. Ce sera Rīga, capitale de la Lettonie en bordure de la mer Baltique. Rīga à l’envers, ça donne Agir, tout un programme… signe diacritique sur le ī mis à part. Ce trait horizontal qui se met sur les voyelles pour les rallonger s’appelle un « macron », une manière de mettre encore plus les points sur les i !
Kolka / Skagen : à 160 km au nord-ouest de Rīga, on trouve le cap Kolka, très ressemblant au cap Skagen, 711 km à l’ouest, exactement sur la même latitude (57°45’N). J’aurais bien commencé mon chemin depuis ce cap emblématique mais ça rallongeait beaucoup trop. Un départ de Rīga sera un joli symbole géographique car cette capitale se trouve à l’embouchure du fleuve Daugava dans la mer Baltique. Et la Daugava est le fleuve le plus septentrional parmi les 7 grands fleuves dont le bassin est partagé par la ligne Baltique-Mer Noire.
Russie / Belarus : mon objectif sera donc de traverser la Lettonie, la Lituanie, la Pologne puis rejoindre Berlin, redevenue capitale de l’Allemagne après la chute du mur. J’avais d’abord pensé traverser l’enclave russe de Kaliningrad mais le visa est trop compliqué à obtenir même pour quelques jours à pied. C’est la même chose pour la Biélorussie (Belarus) qui n’est pas dans l’Union européenne. Je passerai donc au milieu du couloir de Suwałki de 66 km de largeur entre Kaliningrad et Belarus où se trouve la frontière entre la Lituanie et la Pologne, deux pays de l’espace Schengen.
Avion : avant de me mettre en route à pied, je dois me rendre à Rīga et ce n’est pas tout près (environ 2500 km depuis Anglet en passant par Berlin). Mais il se trouve que ce voyage est simple. Je pars à pied de chez moi, je marche les 3 km qui me sépare de l’aéroport. Je prends le vol direct vers Berlin-Tegel à 6 km du centre de Berlin à pied (occasion de découvrir le nord de Berlin). Quelques jours plus tard, je prends l’avion de Berlin à Rīga. La question de prendre l’avion (ou pas) devient omniprésente avec le flygskam lié à l’urgence climatique. Cependant pour ce voyage, les alternatives à l’avion ne sont pas meilleures en terme d’émission de CO₂, de rapidité et de coût (moins de 100 € au total pour 3 vols). Et n’oublions pas que je retourne à Berlin à pied ! L’instauration de taxes significatives sur les vols et sur le kérosène est évidemment souhaitable. Dans l’attente, on peut au moins compenser ses émissions, financièrement ou en plantant des arbres, tout en sachant que ce ne sont que des pis-allers bien loin des enjeux réels.
Zéro plastique : ce périple sera une nouvelle fois « no plastic ». Dans ce cadre, j’éviterai au maximum l’utilisation de plastique à usage unique : ni bouteille, ni gobelet, ni paille, ni emballage, ni poche.
Jakobsweg : ce chemin entre l’embouchure de la Daugava dans la mer Baltique (20 km au nord de Rīga) et Berlin (porte de Brandenburg)  a une longueur de 1460 km. Il passe sur le territoire de quatre pays membres de l’Union européenne : Lettonie (depuis 2004) • Lituanie (2004) • Pologne (2004) • Allemagne (1957, pays fondateur). Il traverse le « couloir de Suwałki », continuité de l’espace Schengen située entre l’enclave russe de Kaliningrad et la Biélorussie. A partir de Kaunas, deuxième plus grande ville de Lituanie après sa capitale Vilnius, ce chemin est jusqu’à Berlin (1230 km) un Jakobsweg, terme allemand très utilisé dans toute l’Europe du nord pour désigner les chemins de Compostelle (caminos de Santiago). Trois chemins de Compostelle très bien balisés sont parcourus : camino Lituano ; camino Polaco ; camino Brandenburg.
Reliefs : les reliefs sont très peu marqués, issus de la dernière glaciation (il y a 12.000 ans) qui a laissé en place de nombreux lacs et vallons. L’altitude moyenne de ce chemin n’est que de 86 m. L’altitude la plus faible se trouve au niveau zéro de la mer Baltique au départ de Rīga en bordure de la Daugava. Le point culminant de ce chemin est à 207 m en Pologne près du village de Diabla Góra dans la Mazury, région de nombreux lacs d’origine glaciaire située au sud de l’enclave russe de Kaliningrad. > voir cette étape
Cours d’eau :  ce chemin est rythmé par la traversée de très nombreux fleuves et leurs affluents, qui rejoignent tous la mer Baltique à l’exception des 100 derniers km avant Berlin où l’on entre dans le bassin de l’Elbe, fleuve de la mer du Nord.
–  Daugava :   Au départ de Rīga, je traverserai la Daugava qui est le plus septentrional des sept fleuves partagés par la ligne Baltique / mer Noire. Le point de départ à l’embouchure de la Daugava est le point d’altitude minimale de ce chemin, au niveau zéro de la mer Baltique.
– Lielupe  A Bauska (Lettonie), je traverserai deux rivières, Mēmele puis Mūsa qui forment à partir de Bauska le Lielupe qui est un fleuve orphelin. En effet, son bassin versant ne remonte pas jusqu’à la ligne de partage continentale entre Baltique et mer Noire.
Niemen / Nemunas  A Panevėžys, je traverserai le Nevėžis, affluent rive droite du fleuve Niemen. A Kaunas le Neris, gros affluent rive droite du Niemen, sera franchi. En quittant Kaunas au confluent Neris-Niemen, je traverserai le Niemen, l’un des quatre grands fleuves baltiques. Plus à l’aval, le Niemen constitue 99 km de la frontière entre la Lituanie et l’enclave russe de Kaliningrad. Le Jakobsweg que je suivrai à partir de Kaunas coupera encore au moins à deux reprises le Niemen à Prienai puis à Alytus. En Pologne, après la frontière avec la Lituanie, le Jakobsweg franchit la Marycha puis la Czarna Hancza, deux affluents rive gauche du Niemen.
– Wisla / Vistule   Le Jakobsweg traverse d’abord la Pisa (affluent rive droite de la Narew > rive droite Wisla) à Giżycko. A partir de Ostróda, le chemin suit la Drwęca qui sera traversée au moins huit fois en près de 200 km jusqu’à son confluent avec la Wisla (Vistule). La Wisla elle-même sera franchie au pont de Toruń, 215 km à l’aval de Warszawa (Varsovie), capitale de la Pologne.
– Odra / Oder A Kruszwica, le Jakobsweg franchit le Noteć (> rive doite Warta). La Warta (> rive droite Odra) sera traversée à trois reprises. L’Odra (Oder des Allemands) sera traversé sur le pont frontière entre Pologne et Allemagne (cf. historique ligne Oder-Neisse) juste avant Frankfurt an der Oder.
– Elbe / Labe  8 km après Frankfurt an der Oder, le Jakobsweg passera du bassin baltique de l’Oder / Odra au bassin atlantique de l’Elbe (Labe pour les Tchèques). Jusqu’à Berlin, la Spree sera traversée à plusieurs reprises. La Spree, principale rivière de Berlin, est un affluent rive gauche de la rivière Havel, dernier affluent important de l’Elbe.

Remerciements
Je remercie sincèrement toutes les personnes qui m’ont soutenu à l’occasion de ce périple à pied :
– Les fidèles des publications facebook pour leurs nombreux soutiens curieux et bienveillants. Ils entretiennent incontestablement une motivation à marcher seul, à se dépasser, à vérifier les informations.
– Les habitants rencontrés dans les 4 pays traversés (Lettonie, Lituanie, Pologne, Allemagne). J’ai toujours eu en face de moi des gens ouverts et gentils, faisant tous les efforts pour m’aider. L’anglais est souvent la seule langue de communication quand on ne parle pas la langue des pays. Les hôtels / hostels sont nombreux et j’ai eu très rarement des difficultés à me loger. Les prix sont très raisonnables.
–  Je me dois également de remercier les entreprises Google (Maps, Earth, Translate), Booking, Facebook, Apple, Free pour les incroyables facilités qu’elles apportent à un marcheur au long cours.
– Pour terminer, je décerne une mention toute particulière à Rita (Panevėžys, Lituanie) et Gina (Meteliai, Lituanie) suite à leur inoubliable accueil dans leur maison.

Laisser un commentaire

Retour en haut